1/8/24
Comme elle savait bien d'entrée de jeu aller au-delà de l'apparence physique sur laquelle butent, négativement ou positivement, un si grand nombre de personnes !
2/8/24
Il faut être bien malheureux pour ne se consoler secrètement que du malheur des autres.
3/8/24
La force permanente de la manipulation consiste à détourner l'attention de ce qui permettrait de la confondre.
4/8/24
Puisque désormais devant moi je vois distinctement la mort, que puis-je faire d'autre que patiemment l'attendre avec de longs soupirs ?
Ainsi pensent confusément tant de vieillards...
5/8/24
"Comme c'est drôle, à vingt ans je ne pensais qu'à aimer, maintenant je n'aime qu'à penser !", confiait Bergson. Elle me disait qu'elle, avec le temps, elle pensait de plus en plus aux amours, à l'amour, à sa raison, à sa folie et à sa puissance universelle.
6/8/24
Le mariage de raison... La raison a incité à l'arrangement et à l'accommodation. L'habitude s'est peu à peu installée dessus. Ils ont fini par chérir leur habitude. Et, d'une certaine manière, ils se sont aimés à travers elle.
7/8/24
Elle a été trop et mal aimée. Dès l'enfance habituée à ce que l'objet d'importance ce soit elle. Elle, qui n'a malheureusement pas dépassé cet égocentrisme infantile ou idiot.
Il aurait suffi qu'elle change le statut restreint de cet ego en sujet à prétention universelle pour tendre vers la littérature ou la philosophie. Mais non, elle est restée ce petit être vaniteux, coquet et prétentieux qui n'aime rien ni personne, et pourtant a tant besoin des autres et des choses pour emplir son vide existentiel !
8/8/24
L'amour comme puissance, vertu même, plus que sentiment... Auquel cas c'est l'Eros, la pulsion de vie, qui a besoin de son objet seulement comme prétexte pour se déployer.
9/8/24
Il me dit que l'amour le plus simple, primordial et archaïque est oral. La faim et l'amour par le sein maternel indissociablement mêlés.
Même dans l'amour le plus sophistiqué on trouvera quelques traces de cette attraction d'appétit. La version démente sera le cannibalisme amoureux.
10/8/24
Il y a dans l'amour romantique narcissique quelque chose de soi qu'on aurait aimé si l'on en avait eu d'avantage conscience et dont l'autre nous renvoie subrepticement le reflet.
Qui se ressemble s'assemble, répète-t-on... Pour le prix d'un, vivez à la fois le plaisir du narcissisme et celui de la compagnie d'un autrui privilégié.
11/8/24
Tu avais une peau qui te protégeait. Avec la passion amoureuse tu ressembles à un écorché.
12/8/24
Elle qui pensait si souvent à l'amour et le vivait à sa façon, charitable et universelle, me déclara un jour : "Le qualificatif essentiel por moi du véritable amour, c'est VIVIFIANT"
13/8/24
Ce n'était pas l'intensité mais la durée de son sentiment de compassion ou bienveillance qui m'impressionnait chez elle.
En elle et tout à la fois, une conscience aiguë de la mort (vanité de l'egotisme) et générosité de la vie (faire croître le vivant et l'humain).
14/8/24
J'aime cette femme, et je la déteste parce qu'à cause d'elle je ne peux plus m'aimer.
J'aime cette femme et en même temps une sourde rivalité s'est instaurée entre nous.
J'aime cette femme et je hais certains traits de sa personnalité qui s'interposent entre elle et moi.
J'aime cette femme et je sais pourtant qu'elle est le bras armé de mon destin destructeur.
15/8/24
L'aspiration à l'éternité, à l'absolu, propre à la passion amoureuse est contrariée par l'humour, qui est distanciation, instantanéité et relativisme.
16/8/24
L'expression littéraire prise entre le Charybde de l'obscurité et le Sylla de la banalité.
Certains trouvent une belle allure en naviguant entre ces écueils...
17/8/24
L'ambivalence qui rend fou...
Le plus souvent, présente dans beaucoup de relations amoureuses, sa part de haine est contrebalancée par une culpabilité se traduisant par des actes positifs.
Mais il arrive que ces mécanismes de rééquilibrage n'aient pas lieu : l'amour et la haine, au même niveau, élevé, finissent par rendre fou celui qui en est possédé. L'acte violent alors, presque libérateur, n'est pas loin.
18/8/24
L'indifférence dans notre société, par éparpillement extrême de l'amour, par dispersion des centres d'intérêt, est ce qui prédomine.
Et parfois la passion peut n'être alors qu'une réaction artificielle, et d'ailleurs peu durable, à cette indifférence de base.
19/8/24
"L'homme qui n'aime que soi ne hait rien tant que d'être seul", écrit Pascal. Phrase contre-intuitive et profonde parlant indirectement de la solitude habitée. Par les autres, par le monde, par la vie.
À compléter avec la phrase de Bergamin : "La solitude du poète n'est pas celle de l'île mais celle de la mer".
20/8/24
La solitude consiste souvent à vivre en compagnie des humains morts, absents, célèbres.
21/8/24
Fuir au plus vite le monstre en soi, c'est-à-dire le fou, le criminel, l'individu bizarre et singulier, bref l'être sauvage et asocial, voilà bien ce qui pousse tant d'humains à se retrouver, à s'assembler, en-dehors de toute utilité.
22/8/24
Vous savez bien qu'on peut être seul tout en étant accompagné, et être en compagnie tout en restant seul...
23/8/24
Il me dit qu'il préfère imaginer les plus folles histoires avec de belles inconnues croisées dans la rue, les cafés, que tenter de les vivre, parce qu'il est certain d'être affreusement déçu.
Et je pensais à ceux qui ont eu la chance de pouvoir vivre avec la réincarnation d'un amour d'enfance, de puberté. Pour eux la déception est moindre que l'émerveillement renouvelé.
24/8/24
Les gens sont bourrés d'envie, rancœur, mesquineries, me confie-t-elle en soupirant. Il me suffit d'entendre leurs commérages quand ils ou elles parlent des uns et des autres... Toute cette petitesse trahit des âmes confinées dans un ego étroit, obscur. Et parfois je préfère les délires de la folie à cette normalité si décevante !
25/8/24
Je réfléchis à ce qu'elle m'a dit la veille et je pense que le sens de la beauté devrait en nous déborder largement de la sphère esthétique.
C'est lui qui nous donnerait de l'espace, de la lumière, de la générosité...
26/8/24
Deux sentiments qui s'imposent toujours dans un régime totalitaire : la peur et le fanatisme.
27/8/24
L'enrégimentement des esprits à l'intérieur et presque toujours un projet de guerre à l'extérieur.
28/8/24
Führer, Duce, Caudillo, Conducator... Quel qu'en soit le nom, cette figure archaïque et monstrueuse de père transforme tous ceux qui l'aiment, l'adoptent ou la suivent en êtres infantiles et irresponsables.
29/8/24
Tu associes la joie à la construction, c'est-à-dire à la fondation et à l'édification soigneuse et patiente. Crois bien que tu ne seras jamais déçu...
30/8/24
Les plaisirs, la joie, le bonheur.
C'est un escalier... La majorité s'arrête aux premières marches des plaisirs, et c'est d'autant plus facile que la société de consommation favorise en leur infinie diversité les plaisirs.
L'accès à la joie est plus rare : il faut donner de soi.
Le bonheur de vivre est exceptionnel. Est-ce une grâce ? Une attitude globale ? Une folie ? Une idiosyncrasie ?... La dernière marche se perd dans la brume argentée de l'Éden.
31/12/24
Tu m'as dit que toute joie ne dépend pas seulement de la création mais également de la compréhension. La joie de comprendre égalerait même celle de vivre... Mais n'impliquerait-elle pas une mise à distance de la morale ?