1/12/19
Pour une émigration brutale, soudaine, on prend avec soi une photo d'êtres chers, peut-être un objet, et c'est tout.
On vous propose dans ce jeu, de choisir un livre, un seul, à emporter sur une île déserte...
Mais on ne peut rien emporter dans le tombeau, strictement rien.
3/12/19
Celle ou celui qui fabrique de la beauté avec des phrases, des notes, des couleurs, des volumes ou d'autres éléments sait combien, aussi laborieux fût-il, aussi génial, il reste médiocre ou minable devant la prodigue Nature qui crée continuellement, et semble-t-il sans effort, des merveilles dans tous ses règnes, minéral, végétal, animal.
Une question pernicieuse vient à l'esprit : et si l'homme, jaloux et plein de ressentiment, voulait en la dévastant se venger de la génialissime Nature ?
5/12/19
"Là où il n'y a plus la force ni de rire ni de pleurer, l'humour sourit à travers les larmes", écrit Karl Kraus. Et Kurt Tucholsky écrivait un livre qui s'intitulait : "Apprends à rire sans pleurer".
7/12/19
D'innombrables voitures filant, sous la pluie et une débauche de lumière froide, dans les boulevards extérieurs. Un ciel lourd, bouché, noirâtre... Une pensée le frappe soudain, et il ne comprend pas comment ni pourquoi : "Notre civilisation a fait depuis le début fausse route, avec de belles promesses initiales trahies. Elle est fichue à moyen terme, et par sa démesure s'effondrera. Une valeur esthétique fondamentale lui a fait défaut : l'harmonie. Harmonie avec la nature, harmonie dans les rapports humains, harmonie entre nos facultés. Or notre civilisation rattrape de justesse un déséquilibre permanent. Demain ça ne marchera plus"
9/12/19
Une citation de Ramon Gomez de la Serna : « Conseil super-philosophique : faites-vous photographier : si vous apparaissez sur la photo, c’est que vous existez »
Une autre : « Pour le carnaval il s’était fabriqué un costume en billets de banque, en trois minutes il fut déshabillé ».
11/12/19
Médiocrité = frilosité, pas d'ascension ni de dépense inconsidérée de soi.
Homogénéisation par les autres en ce qu'ils ont de plus commun.
Éviter soigneusement de se surprendre.
13/12/19
Quand une pénurie, une précarité sont collectivement ressenties, vécues comme factices, arbitraires, injustifiées, alors c'est une situation de révolte ou révolutionnaire.
15/12/19
Les sciences humaines le relativisent, les religions le condamnent et les morales le tancent. Et pourtant...
C'est bien lui le médiateur zélé, laborieux entre le monde intérieur et la réalité extérieure, et entre les désirs exigeants, contradictoires, tumultueux et les idéaux et contraintes imposés par la culture.
En outre, il est rarement compris, reconnu à sa juste valeur, encouragé...
Et c'est de lui qu'émane souvent cette plainte selon quoi la vie est en général difficile à supporter.
Soyons un peu bienveillants envers celui que l'on a reconnu :
le moi, le pauvre moi !
17/12/19
Les récits historiques nous font voyager dans le passé et la science-fiction dans le futur. Nous voulons échapper aux limitations de notre durée de vie sur terre, soit même pas un siècle pour l'immense majorité...
Cependant, les fréquentes dystopies d'une science-fiction catastrophique ou les épouvantables descriptions d'un passé accablé par la misère, les épidémies, l'obscurantisme donnent à penser que ce n'est peut-être pas tant le besoin d'évasion qui nous emporte vers le futur ou le passé, mais plutôt ce plaisir finalement à revenir, soulagés, vers notre présent, pas si affreux que nous le pensions d'abord.
19/12/19
Ce sont des petits plaisirs intenses, mais la société ou l'opinion commune ne les reconnaît pas plus dans son échelle que dans sa nomenclature des plaisirs.
Dès lors tu t'y adonnes avec un vague sentiment de culpabilité ou de stupidité... Mais ce sentiment ne gâche pas forcément ces petits plaisirs, puisqu'ils en deviennent presque transgressifs.
Et en plus, c'est sur la base de ces petits plaisirs, ni reconnus ni validés par les autres, que tu vas commencer à prendre quelques distances par rapport aux plaisirs conformes, réputés et majoritaires.
Alors tu vas pousser une porte qui date de ton enfance et, solitaire, redécouvrir ton fameux jardin secret.
21/12/19
Certains doutent du magnifique syndrome de Stendhal, le réduisant à un stress, une fatigue, un énervement extrême de touriste. C'est dommage, car c'est l'une des rares pathologies pour lesquelles on puisse non seulement éprouver sympathie et tendresse, mais encore espérer secrètement que ses racines soient profondes et qu'elles nous renseignent sur une éventuelle "folie de la beauté".
23/12/19
La beauté a quelque chose d'animal, le beau a quelque chose de spirituel. C'est l'inverse de ce que pensait Joubert.
25/12/19
Comment réenchanter Noël ? L'omnipotent commerce a enchanté la marchandise et, bien entendu, nous avons subi en retour la marchandisation de l'enchantement !
Aujourd'hui qu'il n'y a plus d'hiver, avec le réchauffement de la planète, que le Père Noël s'est vendu à Coca-Cola, que le merveilleux s'est disneyifié tandis que jusqu'à l'écoeurement prévaut le cynisme, que l'enfance est de plus en plus la proie de pédophiles, que les espérances sont trahies, on doit absolument chercher au plus profond de soi, dans le jardin le plus secret, la pierre magique du grand oubli pour, à nouveau, réenchanter Noël et le monde.
27/12/19
Au bord du grand fleuve, un épais brouillard a aborbé les formes et les contours. On ne sait pas d'où viennent ces vagues clapotements ni à quoi correspondent ces incertaines silhouettes. Une humidité froide se glisse sous les vêtements, une odeur de bois et de moisissure monte du sol. Peut-être qu'en entrant dans le brouillard qui flotte sur cet Achéron, allons-nous croiser les morts récents, en route vers l'autre rive.
29/12/19
La ville thermale pour les problèmes gastriques et intestinaux : il n'y a pas de curistes ou ils sont bien cachés, mais alors que de restaurants, de pâtisseries, de chocolateries !
31/12/19
Saint-Sylvestre dans les cellules des prisons, dans les chambres d'hôpital, dans les baraques des SDF, dans les hospices de vieillards, dans les orphelinats des pauvres. Champagne pour tout le monde !