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Janvier 2021

2/1/21

On s’aperçoit, en les analysant, que la plupart des œuvres d’art sont d’ingénieux bricolages d’éléments hétérogènes.

Rendre invisible ce bricolage est l’un des attributs du génie créateur.

 

4/1/21

Finalement le voyage, la photographie, en stimulant la curiosité, peuvent aussi être des voies indirectes, d’excellentes aubaines pour être présents au monde.

Ce que, emportés par le flux permanent et indistinct de notre mental, nous sommes rarement.

 

5/1/21

Couverts par l’immense drap froid et grisâtre du ciel, tous dans la ville somnolaient, hibernaient, même en s’activant…

 

6/1/21

Il est très rare que nous percevions clairement de l’intérieur nos défauts, nos travers.

L’euphémisation nous donne souvent le moyen de les présenter à nous-mêmes sous le meilleur jour. Et chaque qualification possède, on le sait, un synonyme atténué. Ou bien une formulation méliorative, voire laudative…

C’est ainsi par exemple qu’une personne vraiment insupportable, pénible se vantera, la main sur le cœur, d’être « entière » !

 

8/1/21

Rien qu’en observant tous les détails de cette admirable bande dessinée, la gestuelle des personnages, les plans et décors choisis, la subtilité des couleurs, etc., il imaginait avec envie l’emploi du temps à la fois plein, doux et carré du dessinateur, son contentement justifié devant les difficultés multiples surmontées, la conviction intime qu’il poussait devant lui une grande œuvre, comme une boule de neige qui ne fait que grossir et lui faire même oublier l’individu, hors du dessinateur, qu’il était… Encore mieux que les exercices de zen ! Il songeait à ce chapitre d’un livre de maître Suzuki, « Polir une tuile ». Pour en faire un joyau.

 

10/1/21

La plupart des humains aiment qu’on leur raconte des histoires, ont besoin de fiction. En cela ils sont restés enfants. Une bonne part de l’art (littérature, théâtre, cinéma…), par les innombrables fictions qu’il a su produire, satisfait l’enfant en nous.

Il y a bien sûr des humains qui se nourrissent de la complexité du réel uniquement, et que les fictions importunent parce qu’elles les détournent de cette nourriture exclusive.

Mais il existe également une dernière catégorie d’humains, plus rare, que la fiction importune également mais qui, en même temps, adorent l’art. Mais ce qu’ils recherchent en lui et pour des raisons mystérieuses, c’est juste le style, la forme, le langage secret.

 

12/1/21

« Le sculpteur pense marbre », écrit génialement Oscar Wilde.

L’artiste, complètement possédé par son matériau et ses infinies potentialités…

 

14/1/21

Les états d’âme nous baignent ou nous enveloppent tellement qu’ils imprègnent notre appréhension de la réalité. Et nous voilà persuadés alors que c’est le monde qui est la cause essentielle de ces états d’âme.

Mais si nous développons en nous une instance suffisamment puissante pour envelopper ces mêmes états d’âme, nous parvenons peu à peu à une sorte de neutralité de l’humeur, à une sérénité qui, pour autant, ne nous dissocie pas des incidences de la réalité.  

 

16/1/21

Que le soleil soit nouveau tous les jours est le credo de l’artiste.
Qu’enfermé dans son mouvement répétitif et calculable, il soit prévisible, est le constat du scientifique.

Mais, comme le soleil n’est pas éternel et comme il s’éteindra un jour, le sage réconcilie l’artiste et le savant en disant que tout a une histoire, ce qui intéresse aussi bien l’un que l’autre.

 

18/1/21

Ne t’en agace pas, mon ami, ce type résonne beaucoup simplement parce qu’il est creux.

 

20/1/21

Toutes nos peurs ont peut-être la même origine commune : c’est la conscience en nous qui se terrorise du néant, de l’impossibilité absolue de se le représenter.

 

22/1/21

Semper eadem

Tu es parti dans une autre ville. Un court voyage.

D’autres architectures et d’autres parlers… Tu t’attaches bien sûr aux différences, c’est toujours elles qui sollicitent notre curiosité. Mais le ciel est partout le même dans sa vastitude.

Ainsi l’ample conscience de celui qui médite, accueillant ces multiples différences et ces variations permanentes, mais au fond toujours la même.

 

24/1/21

Ils ont besoin des autres, mais en fait ils ne s’aiment pas, ou si rarement.

Ils en veulent aux autres d’avoir besoin d’eux, autant pour être reconnus que pour échapper à l’ombre gigantesque de la mort.

Ils ont besoin de se rapprocher, ils ont envie de se frapper : la situation est désespérément comique.

 

26/1/21

Parfois les raisons et justifications que donnent les artistes pour rendre compte de leurs œuvres, de leur inspiration, ressemblent un peu aux boniments du camelot qui visent autant à valoriser leur produit qu’à faire diversion et empêcher qu’on l’observe vraiment.

 

28/1/21

Nous nous sommes habitués aux additions du plaisir, aux soustractions du manque. Et nous croyons que ce calcul est sans fin. Mais un jour nous comprenons que cela ne veut absolument rien dire,

que toute cette comptabilité de joies et de frustrations va être froidement et définitivement balayée. Cependant, nous la continuons cette comptabilité, nous ne pouvons pas faire autrement.

 

30/1/21

            Après un long silence, elle nous a confié :

            « Finalement c’est très ardu de vivre avec un artiste… Ils exercent sur nous une mystérieuse attraction mais c’est trompeur. On trouve entre deux personnes dans un couple en général de la coopération mais aussi de la compétition. Et surtout il existe une reconnaissance mutuelle qui se fait tant bien que mal. Cela ressemble un peu à un marché : tu reconnais ça en moi, je reconnais ça en toi. Et il y a bien sûr le désir charnel… ». Puis en souriant avec une pointe de tristesse, elle continua : « Mais avec ces drôle d’animaux-là, rien ne marche vraiment comme d’habitude. D’abord la coopération et la compétition ne prennent pas... Sauf si l’on est soi-même artiste, d’où ces couples d’artistes, qui sont orageux peut-être mais enfin qui peuvent marcher, durer. Mais si l’on n’est pas artiste, on ressent avec douleur que ce fichu animal est souvent dans sa bulle, qu’il fuit même le contact. Ou alors il a de ces faims de contact ou charnelles courtes, brutales et comme désespérées. Sinon, il se terre dans son monde, impénétrable comme un chat… Il aime son œuvre, il se bat avec elle. Bon, qu’est-ce qu’on vient faire là-dedans ? Si on lui sert de Muse, c’est juste une image, plus ou moins aliénante. Et si on lui sert juste de raccord avec la prosaïque réalité, ça n’a rien d’exaltant… Alors il faut se contenter de l’aimer, cet animal, et aménager peu à peu sa propre solitude. »

            Puis, après réflexion, elle conclut à voix basse, en ne regardant plus personne : « Mais peut-être au fond est-ce parce que je voulais secrètement rester seule dans ma tête que j’ai choisi de vivre avec un artiste ! ».

 

 

 

 

 

rien dire, que toute cette comptabilité de joies et de frustrations va être froidement et définitivement balayée. Cependant, nous la continuons cette comptabilité, nous ne pouvons pas faire autrement.

  

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