1/6/25
À la question simple "qu'est-ce qui t'anime ?", il a vu beaucoup de ses contemporains se défiler... Question d'époque : les "âmes mortes" sont maintenues dans cet état semi-comateux par l'universel divertissement.
2/6/25
Vous courez éperdus dans "les vastes palais de la mémoire" (Saint-Augustin), ne croisant que des spectres, des ombres furtives. L'essentiel de votre vie est là désormais... Son irréalité croissante vous prépare à la grande consolation de "la vie est un songe" (Calderon).
3/6/25
La pensée du vide produit la possibilité du mouvement intérieur, de la liberté. Le sens comme agrégat n'est pas définitif. Les éléments flottent dans ce vide en quête de nouvelles combinaisons.
4/6/25
Il me dit qu'on choisit la solitude quand elle est habitée. Ceux pour qui elle est seulement vacuité, manque, la fuient dans les autres, qui eux-mêmes se fuient aussi sans doute.
Mais je lui parle de la relation privilégiée entre deux intelligences et sensibilités. N'est-ce pas une belle chose que l'amitié ?
Elle est si rare, soupire-t-il...
5/6/25
Si Hitler avait réussi son examen d'entrée à l'école d'art de Vienne, le monde serait tout autre...
6/6/25
Il me dit avec un sourire noir : "Je ne témoignerai pas de l'éternité de mon néant. Et que pourrais-je en dire d'ailleurs ? "
Je lui réponds avec Platon : "Le temps est l'image mobile de l'éternité". Plus de temps, plus d'images, plus de récits. Ce dont les vivants se nourrissent, non ?
7/6/25
Il est bon d'avoir quelques images de soi heureux dans le futur. Ne pas se laisser dans l'incertitude, car les scénarios négatifs pourront en catimini s'imposer, sans alternative.
8/6/25
Il y a culpabilité si vous ressentez celle où celui que vous avez lésés comme votre semblable.
Si vous ne pensez pas les avoir lésés et/ou si vous les vivez comme très différents de vous, il y a un risque que la culpabilité ne vous touche pas.
9/6/25
Le remords nous confronte à ces forces inconscientes qui nous poussent à faire, par besoin de transgression, ce que nous condamnons. Paul Valéry dit que le remords est de même nature profonde que l'attrait de la faute.
10/6/25
Arrive un moment, parfois très court, où l'on peut tout de même répondre de ses actes : alors commence la responsabilité.
11/6/25
Plus l'argent permet, dans une société, et plus l'immoralité peut croître librement.
12/6/25
Les choses sont vivement secouées. On attend une reconfiguration prometteuse. Mais voilà qu'inattendue une fine poussière grise retombe sur l'ensemble et le recouvre peu à peu.
13/6/25
Les dictatures ne recouvrent pas une société alternative qu'elles se sont chargé d'éradiquer mais le chaos. Si bien que lorsqu'elles s'effondrent, c'est lui qui tout de suite émerge.
14/6/25
Il y a quelque chose d'inaccessible dans les objets du désir les plus forts parce qu'ils sont nés dans l'imaginaire, qui entretient avec la réalité des rapports d'insoumission jusqu'à lui préférer la folie.
15/6/25
Rigueur dans l'expression, l'usage des mots.
Une exigence pour la philosophie, non pour la littérature.
16/6/25
Bien décrire c'est commencer déjà à comprendre.
17/6/25
Une vie quiète... Ils font leur boulot, gèrent l'intendance, s'adaptent à la norme et continuent la tradition, mais alors, pour le reste spirituel, ils n'ont plus le temps ni l'énergie. Alors ils s'en remettent à la religion. Ils sont vaguement pratiquants.
18/6/25
Revenir rarement et brièvement : c'est le peu d'indiscrétion que les morts peuvent manifester...
19/6/25
Tant de promesses de bonheur ! Et nous nous tournons spontanément vers l'avenir... Mais non, il faut tenter de retrouver les sentiments, les émotions de notre enfance.
20/6/25
Il me dit avoir entendu cette phrase assez juste dans un bus "fais bien ton travail et tu seras en paix", et du coup s'être demandé ce qu'il en était alors des retraités...
Voilà pourquoi ils courent dans tous les sens, lui ai-je dit.
21/6/25
Chez Italo Svevo, le héros n'obtient pas ce qu'il veut... C'est toujours raté ou à côté ou décevant. Il nous faut accepter une vie en mineure ou dissonante ou décalée. Même l'échec n'est pas réussi. Tout ça est si piteux qu'on peut en rire...
22/6/25
Quand deux ennemis se font une guerre incessante, il faut concéder au perdant (qui prendra sinon tôt ou tard sa revanche) un autre type de victoire ou sur un autre niveau. On ne gagne jamais à humilier complètement un adversaire.
23/6/25
Elle me dit : "L'amour romantique entre un homme et une femme reste une construction historique et poétique, comme l'a montré Denis de Rougemont, et l'individualisme occidental s'en est enrichi. Mais il se déconstruit progressivement sous les coups du cynisme capitaliste, des revendications féministes et de l'expression libérée des autres sexualités... Il ne disparaîtra pas, mais trouvera une place plus juste, adéquate, celle d'une minorité en fait. Parmi d'autres."
24/6/25
Le fétichiste accorde une puissance extraordinaire à une partie du corps... Cette puissance qui s'exprime par là va jusqu'à effacer la subjectivité. L'humain n'est plus qu'un vecteur d'énergie, et seulement par une partie de son corps... Peu importe son individualité !
25/6/25
"La faim peut être présente dans le désir sexuel, même si à priori elle n'a rien à y faire... C'est une imprégnation d'oralité dans la génitalité, ou encore une trace discrète de cannibalisme, ou enfin une appropriation du symbole que constituent la Chair ou le Phallus ou la Béance féminine... La prédation sauvage existe dans le désir sexuel !", me dit-elle.
Et je pense aux hantises de certaines féministes... Mais le pénis n'est-il pas pour certaines femmes une bonne saucisse ?
26/6/25
Ils peignaient cette heure, ce lieu, cette atmosphère parce que pour eux c'était un absolu. Et c'était un absolu hors du temps parce qu'ils pouvaient en faire une peinture, et que tous ceux qui aimeraient cette peinture le vivraient aussi comme un absolu.
27/6/25
Tu es vieux quand plus rien de neuf ne sort de toi.
28/6/25
Les êtres du ressentiment... Tout ce qui manifeste la puissance et la générosité les dérange. Ils souhaiteraient que l'humanité entière croupisse dans la médiocrité parce que leur fatigue de vivre s'offusque de l'énergie débordante.
29/6/25
Il me confie qu'il avait, plus jeune, une histoire d'amour bien précise à vivre et avec un type de femme particulier. Il a rencontré cette femme et ils ont commencé à vivre cette histoire-là... Seulement voilà, la femme l'a quitté.
Et il s'est rendu compte qu'il ne possédait pas un autre scénario de rechange et ne rencontrait pas d'autre modèle lui convenant. Voilà pourquoi il est resté seul.
30/6/25
J'ai toujours eu l'impression que tu trinquais à la gloire, en l'honneur ou à la santé de ceci ou de cela. C'était ton permanent exercice d'admiration... C'est ainsi que tu es devenu alcoolique.