1/3/24
Il me dit : "À la question classique et humaniste du Qu'est-ce que je laisse aux autres - héritage, créations, traces -, je veux ajouter : Qu'est-ce que je ne leur laisse pas, c'est-à-dire tout ce qui sera inconnu à jamais de tous, et qui se dissipera avec mon effacement... "
Je crains, lui répondis-je, que nous ne soyons vraiment originaux ni dans ce que nous léguons ni dans ce que nous gardons en nous. En ce sens et par notre banalité, nous sommes déjà morts de notre vivant.
Mais est-ce que je ne sous-entends pas ainsi que la seule manière d'être éminemment vivant consiste en une singularité absolue ?
2/3/24
Indirectement le cynisme presque nihiliste et l'hédonisme creux du personnage du Neveu de Rameau témoigne de la déliquescence de l'aristocratie. En face Diderot incarne les vertus de la bourgeoisie montante.
Deux siècles après, on n'a pas arrêté de décrire, notamment par le cinéma, les turpitudes, la corruption et la décadence de la bourgeoisie... Mais comme en face l'on ne perçoit pas quelles sont les vertus innovantes du prolétariat (la solidarité ? La générosité ?), celui-ci ne peut pas encore devenir la classe montante.
3/3/24
Hélas la grande bourgeoisie est bien plus solidaire pour étayer ou maintenir ses intérêts de classe que le prolétariat pour revendiquer les siens.
4/3/24
Mais au final d'où vient son charme irrésistible ?
De son compte en banque.
5/3/24
Et si enfin l'on essayait autre chose que la religion ou alors le Profit qui soient le fin mot des actions humaines, mais la Raison ?
La Raison ne fait pas rêver... Mais ses effets à long terme : un monde où règneraient la justice, la vérité, l'harmonie ?
Il évoquerait Les Chroniques martiennes de Ray Bradbury !
6/3/24
L'idéalisme est la pensée abstraite sans contraintes, mais sans elle point d'idéal ni d'utopie. Le réalisme est la pensée de la contrainte (et une ironie à l'encontre de l'idéalisme) mais elle ne peut pas nous guider.
7/3/24
"Quoi que vous fassiez, vous faites mal" dit Freud. C'est clair. Excellente façon de rappeler nos désirs contradictoires et le prix à payer pour toutes choses.
8/3/24
Ceux qui ont perdu leur part d'enfance, sont dénués d'imagination et collés au présent n'ont pas peur.
9/3/24
Les mots, pour dire le plus précisément possible ses peurs et s'extraire par le langage de cet envoûtement solitaire.
10/3/24
On s'attendait par peur à quelque chose de terrible mais ce ne fut pas grand chose... On anticipait un bonheur magnifique, et ce ne fut qu'agréablement banal. Les émotions, disproportionnées, sont-elles une parade à la banalité de l'existence ?
11/3/24
La peur a fait les dieux.
Les dieux continuent à faire certaines peurs...
12/3/24
Trop de mépris chez le dictateur, de ce que sont les hommes ou simplement de leur vie. Le mépris finir par aveugler. Le mépris conduit à des méprises.
C'est finalement par le réel que le dictateur est toujours vaincu. Et comme nul autour de lui, par peur, n'ose le lui rappeler...
13/3/24
Le nationalisme comme justification idéologique de la dictature. Mais les hommes n'aiment pas durablement et si profondément leur nation d'appartenance, sauf si elle est attaquée.
14/3/24
Ce qui fait de nous un être créatif, original, singulier se voit le plus souvent abîmé ou érodé par notre adaptation plus ou moins nécessaire à la réalité.
15/3/24
Il doit affronter une jungle inextricable de causes entremêlées celui qui s'est mis en tête de découvrir l'exacte origine d'une humeur ou d'un sentiment...
16/3/24
La réflexion, manière de s'y retrouver.
La méditation, manière de se retrouver.
17/3/24
Il me dit que l'entreprise est un presse-citron, ses employés les citrons qu'on a pressés puis jetés, le jus étant dégusté par le patron et les actionnaires...
18/3/24
Un jour (mais quand ?) l'on considérera l'exploitation de l'homme par l'homme avec des yeux aussi effarés que nous voyons aujourd'hui l'esclavage.
19/3/24
Elle pense à cette légère mais indicible souffrance cueillant les uns et les autres au petit matin, au réveil...
Ils sortent à peine des rêves et de leur monde enchanté. Le réel se présente à eux, médiocre, rugueux et polémique. Et le fardeau de l'existence qu'ils avaient déposé à la porte, ils devront tout à l'heure en accabler leurs épaules...
Je lui dis qu'alors chacun a ses petites ruses et satisfactions, ses rituels de passage du monde rêvé au monde réel, pour affronter le malheur banal de l'existence, mais qu'il est donné à quelques-uns, par la pensée, l'art ou la mystique, de se réveiller plus heureux encore que dans leurs rêves.
20/3/24
Le recours aux "valeurs" pour justifier la violence prédatrice de leurs invasions ou de leur oppression... Les dirigeants des grandes puissances rendent ainsi un hommage indirect et contraint à la morale... Elle n'est peut-être qu'un conte de fée, mais les humains, ces grands enfants, y tiennent beaucoup !
21/3/24
Les humains ont des intérêts divergents, il s'en suit des conflits permanents, les plus forts l'emportent.
Pour résoudre cette situation, il faut développer les intérêts convergents.
Il y a une convergence d'intérêts par exemple sur l'habitabilité de la planète...
22/3/24
Il me dit qu'il ne trouve le plus souvent dans la société des autres que des dicours obligés et des propos convenus. Dès qu'une parole est libre, elle passe pour inopportune ou malséante.
C'est aussi l'un des effets de la politesse que s'effacer devant les autres. La parole spontanée, libre est une expression brute de soi, presque sauvage.
23/3/24
Depuis Duchamp, l'art contemporain a voulu complètement se débarrasser de toute dimension artisanale dans l'art en préférant l'idée, le concept au faire minutieux. Et ce dernier est sauvegardé par l'art brut ou alors l'illustration, la bande dessinée... Cependant une synthèse des deux reste possible (exemple : Jérôme Zonder).
24/3/24
Une pure, belle et brillante unité nationale convergeant vers ta figure toute-puissante...
Mais ce n'est qu'un rêve, Ô dictateur !
Réveille-toi au plus vite de ce rêve de mégalomane car, pour le réaliser, tu n'arrêtes pas de répandre malheurs et massacres !
25/3/24
"Corruptio optimi pessima" : la corruption de ce qui est meilleur est la pire... Il est ici fait mention de la tyrannie, corruption d'un pouvoir idéal.
Mais ce pouvoir idéal n'existe pas et Dieu n'inspire pas les hommes pour leur donner leurs lois, comme le souhaitait Rousseau. On connaît la formule selon laquelle le pouvoir corrompt et le pouvoir absolu corrompt absolument (Lord Acton). Mieux vaut concevoir divers contre-pouvoirs ou repenser le plus efficacement possible la démocratie.
26/3/24
Être victime n'est pas une essence mais une situation. Les victimes d'aujourd'hui peuvent devenir les oppresseurs de demain, sauf si leur mémoire les en empêche.
27/3/24
Comment est-il devenu ce vieil anarchiste misanthrope et solitaire ?
Il sentait le fiel du pouvoir partout, même dans l'amour. Et il haïssait le pouvoir, viscéralement...
28/3/24
Le freudo-marxiste : quel autre progrès que, individuelle et collective, la desaliénation, l'émancipation ? Se passer de Dieu, du Père, du Phallus, des patrons. Advenir à la maturité et à l'autogestion...
Mais saurons-nous survivre à cette enfance de l'humanité, morte à jamais ? Saurons-nous enfin devenir politiquement adultes ?
29/3/24
Les humains, solidaires face au néant.
Problème : ceux, nombreux, les croyants, pour lesquels le néant n'existe pas...
Du coup évidemment c'est chacun sa religion, et il n'y a plus de solidarité !
30/3/24
Préservé des incertitudes, des illusions et des tiraillements de la politique, rationnelles et méthodiques, les technosciences avancent vite, efficacement.
Mais leurs résultats, concrets et incontestables, se voient mis au service de ces mêmes politiques éminemment contestables.
31/3/24
Il me parle de cette rapacité venue du fond des âges et qui n'est pas seulement due au manque, selon lui, mais à la conscience sourde qu'on va tous crever, qu'on n'a qu'une vie, une seule, et qu'il faut en profiter...