Novembre 2025

1/11/25

     Elle pense souvent aux modèles contraires possibles de la maladie mentale, saisie comme dysfonction coûteuse : en quoi consisterait la santé mentale authentique ? Évidemment elle a en tête les modèles freudien ou reichien ou frommien mais aussi les travaux d'Abraham Maslow sur l'accomplissement de soi. Mais à un moment donné, sa réflexion patine si elle exclut le contexte sociopolitique et les normes en vigueur, à moins de pathologiser tout un régime politique, toute une société... Qu'est-ce qu'être sain sous le nazisme, le stalinisme ou l'ultralibéralisme ?

 

2/11/25

     Homologie entre l'esprit du fou, du primitif et de l'enfant ? Une tendance à l'animisme, à la pensée autistique, à l'instabilité affective, une croyance en la magie, une imperméabilité à l'expérience, etc...

     Des généralisation tentantes mais abusives. Il convient d'interroger d'abord ce modèle de l'homme "normal, adulte et civilisé" à partir duquel on jugerait des formes inabouties d'humanité. 

 

3/11/25

     Krishnamurti faisait de l'Attention universelle la vertu fondamentale et, bien plus, une attitude existentielle. Or c'est ce que nous sommes de plus en plus en train de gâcher, perdre aujourd'hui. 

 

4/11/25

     L'homme est le seul animal qui peut se transformer lui-même. Et cette toute-puissance lui fait croire à un destin exceptionnel... Peut-être est-ce vrai ? Ou alors la simple rêverie creuse et dérisoire de sa mégalomanie...

 

5/11/25

     Il me dit qu'il y a une sorte de fureur aveugle dans la course éperdue, insensée du temps.

 

6/11/25

     La concaténation des actes, dans un ordre inamovible de succession, propre à l'habitude, a quelque chose de mécanique, qui la rendrait comique selon la théorie de Bergson. Sauf que le spectateur, lui-même habitué, ne remarque même plus tous ces automatismes du quotidien.

 

7/11/25

     Un désir inconscient peut déchirer la trame serrée de l'habitude. Et c'est alors un évènement inconscient contre une structure inconsciente.

 

8/11/25

     Comment se défaire de cette habitude ? Son origine secrète était une peur d'enfance...

 

9/11/25

     "Le plaisir de l'habitude est souvent plus doux encore que celui de la nouveauté", écrit Proust. Ce plaisir procède de cette illusion de la permanence des choses, et peut-être de notre éternité. 

 

10/11/25

     "De la nourriture ultra-transformée à la criante injustice, en passant par la permanente grisaille ou les sirènes de police... Non je ne m'y habiitue pas. Et c'est tant mieux ! Tout ça me reste extérieur et hostile. Je continue à le refuser... J'imagine que certains psychologues jugent ce refus de l'habituation comme une forme d'inadaptation. Voire du masochisme... ? Mais pour moi, c'est surtout le signe que la conscience (et donc le choix) est déjà présente potentiellement avant l'habitude. Sans doute jamais assez, nous sommes déjà trop robots ! ",  me dit-il. 

     Burke disait que l'habitude nous réconcilie avec tout. Certains ne veulent pas de cette réconciliation universelle...

 

11/11/25

     Les professeurs d'art a priori contre l'habitude... Par exemple on rappelle ce conseil de Toscanini à ses élèves : "Ne jouez jamais comme d'habitude. Désapprenez, et recommencez." Mais il y a là une bonne part de posture : la base reste toujours les compétences acquises par l'habitude.

 

12/11/25

     Ambivalence de l'habitude : économie, rapidité, mais aussi rigidité, inconscience.

 

13/11/25

     Une nation n'est pas seulement une communauté résultant de l'Histoire et reconnue par chacun de ses membres. Elle est également un choix de société voulu collectivement. 

     Par exemple, rejetant son histoire commune avec la Russie, qui fut une expérience négative et douloureuse d'oppression, la nation ukrainienne se projette dans un futur démocratique, avec l'Europe. En tant qu'objet d'attachement à ce projet commun, la nation ukrainienne devient une patrie pour laquelle le sacrifice suprême peut faire sens.

 

14/11/25

     Dans tous les régimes autoritaires, autocratiques, l'individu et le collectif sont réduits à l'obéissance. Une structure pyramidale assure à une figure charismatique, supposée infaillible, le maximum de pouvoirs. On peut remplacer, de façon plus subtilement autoritaire, cette figure humaine par un système supposé également supérieur,  par le savoir et la compétence, au collectif gouverné, comme dans la technocratie. 

     Mais nul individu, nul système n'est infaillible. Seule une véritable démocratie peut s'appuyer sur l'intelligence collective et le débat pour faire les choix les meilleurs, simplement en tant qu'ils furent voulus par le plus grand nombre.

 

15/11/25

     Déjà La Bruyère écrivait :  "Que me servirait que ma patrie fût puissante et formidable si, triste et inquiet, j'y vivais dans l'oppression et dans l'indigence ?". La fonction de la propagande est justement de faire croire au peuple le contraire. 

 

16/11/25

     Limites de la démocratie libérale : le monde du travail où règne le patron,  celui des loisirs où l'illusion, quand ce n'est pas l'abrutissement, détourne de la responsabilité citoyenne. En plus c'est toujours la classe dominante qui est maîtresse de l'information et qui, par ses médias, modèle l'opinion publique.

 

17/11/25

     Il se demande comment il a construit son système de valeurs et, comme il a du mal à en faire la généalogie et craint qu'il lui a été simplement seriné dès l'enfance, il entretient quelque défiance à son égard. 

 

18/11/25

     Elle craint qu'un jour les humains deviennent indifférents, étrangers à tout, sauf à leur série préférée... Les monades de Leibniz égarées dans le Meilleur des mondes d'huile ! 

 

19/11/25

     "Les peuples qui se sacrifient meurent par des idées. Mais ceux qui les sacrifient vivent pour des intérêts.", écrit Romain Rolland. Adoptons cette remarque dont le cynisme est éclairant pour être, parfois, contredit... En tous cas l'intérêt se présente toujours dissimulé sous l'idée, l'idéal. 

 

20/11/25

     Il vitupère :  "C'est encore et toujours la même chose : une minorité qui opprime la majorité, un dictateur qui s'impose aux foules... Comme si les humains avaient besoin d'obéir ou de s'en remettre à une instance "supérieure" ! Comme si l'horizontalité de leur liberté leur faisait toujours peur !..."

     Elle lui dit : "Ils ont été enfants, donc dépendants, avant de devenir adultes. Ils ont cru avant de savoir. Et ils fuient dans une forme ou une autre de servilité l'absurdité de leur condition".

 

21/11/25

     Un rappel que l'esprit critique appréciera : l'étymologie d'"ob-jet" est la même que celle de "pro-blème". Simplement la première est latine, la seconde grecque. 

 

22/11/25

     Il voyait dans l'esprit critique et un scepticisme railleur comme une aristocratie de l'intelligence.

     Mais son esprit toujours irrévérencieux était possible tant qu'il n'aimait vraiment personne. 

 

23/11/25

     Hélas aucun esprit critique n'aura les fortes jouissances d'abandon de soi du fanatique.

 

24/11/25

     Alors comme ça, de toutes ces merveilles accumulées durant notre vie, nous n'allons pas en emporter une seule dans notre tombeau ?

 

25/11/25

     On ne se connaît pas si l'on est incapable de se critiquer. 

 

26/11/25

     Tes souffrances morales, essaie de les percevoir comme celles d'un personnage de roman, de fiction... Cette attitude contribuera d'autant plus à les déréaliser qu'elles sont déjà en bonne partie imaginaires.

 

27/11/25

     La plaisanterie... Un système totalitaire ne supporte pas cet écart qui risque, avec une certaine joie éprouvée, de le relativiser (cf. "La plaisanterie" de Kundera). Mais le dictateur et ses servants peuvent, eux, se permettre la plaisanterie, toujours du genre ironique et recélant une terreur.

     Par ailleurs la plaisanterie n'est pas admise dans le cadre du dogme religieux (notion de "blasphème),  également lorsqu'elle fait beau jeu de tragédies collectives. Nous considérons alors qu'elle favorise l'oubli,  et dessert notre éducation par la mémoire. On ne doit pas rire avec l'Histoire.

 

28/11/25

     La seule transcendance qu'athée, cynique, réaliste,  désabusé sur tout, il rencontrait dans la vie, c'était l'art... Parce que l'art est, en tant que création, une ligne de fuite (Deleuze), un dépassement imprévisibles.

     Pour moi, le réel, dans sa complexité qui nous dépasse toujours en dépit des élaborations continuelles de la science, est paradoxalement notre transcendance. "Ce qui est mystique, ce n'est pas comment est le monde. Mais le fait qu'il est", disait aussi Wittgenstein. 

 

29/11/25

     Nos pensées, justes ou fausses, bonnes ou mauvaises, ont tendance à s'imposer à nous, spontanément tyranniques. 

     Le premier peut-être Bouddha a fortement insisté sur la maîtrise de nos pensées par la méditation. Puis la démocratie athénienne a permis la réflexion philosophique, c'est-à-dire la confrontation des pensées, parce qu'elle rendait possible le débat, extérieur et intérieur. 

     Mais ce sont là des conquêtes fragiles, car la pensée reste spontanément tyrannique.

 

30/11/25

     Ne nous connaissant pas assez nous-mêmes, il est logique mais dommageable que nous méconnaissions, donc négligions, nos ressources intérieures. 

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

Ajouter un commentaire

Anti-spam