1/9/23
En général, dans les guerres, l'agresseur affirme qu'il est agressé, il ne ferait que se défendre ou se protéger. Ou alors il élabore une doctrine qui masque son agression en la justifiant (irrédentisme par exemple).
Pourquoi toutes ces justifications ?
Parce qu'il s'agit de fonder en droit la violence pour l'inscrire dans la temporalité, et réécrire l'histoire...
2/9/23
Une fois que l'une des deux parties a gagné, il va s'agir pour elle de normaliser au plus vite cette situation, de la constituer en ordre.
Refuser cette normalisation sera alors considéré comme s'en prendre à l'ordre, dans l'absolu.
5/9/23
Le réalisme, le cynisme gagnent au décodage strictement économique des dimensions spirituelles, artistiques et même affectives (cf. Balzac). En même temps il semble que l'être humain ne puisse pas en rester à ce matérialisme réducteur, qu'il a toujours un pied dans le rêve, l'imaginaire ou même simplement un mensonge consolateur qui lui permette de supporter l'absurdité de sa condition.
7/9/23
C'était l'idéal de l' "Homme total" qui l'avait conduit à s'intéresser à tant de choses. Mais qui trop embrasse mal étreint. Le temps était passé, son idéal avait ranci. De son bel universalisme il ne restait plus que désordre et poussière...
8/9/23
Il avait enfin achevé son superbe édifice théorique, et il ne lui restait plus qu'une brique à caser quelque part : la mort.
Mais, où qu'il la plaçât, elle transformait son château en ombre.
12/9/23
Il me dit : "nous n'avons qu'une vie, elle est brève et nous devrions en savourer chaque minute... Qu'est-ce qui fait, hors les tâches obligées, que nous gâchons le temps stupidement, que nous gaspillons l'or de la vie comme si nous ne devions pas un jour être définitivement ruinés par la mort ? Pourquoi restons-nous si creux et frivoles ?"
Je lui réponds que justement nous ne pensons pas à notre mort, et peut-être même qu'au fond nous n'y croyons pas parce qu'elle est inconcevable.
14/9/23
Elle me parle des souffrances morales de gens qu'elle connaît comme si elle pouvait en mesurer la profondeur.
Mais autant la douleur physique peut s'évaluer, autant la souffrance morale serait de l'ordre du qualitatif. Celui qui ne trouve pas de sens à sa vie, celle qui a été abandonnée, ou encore celui qui est en contradiction avec ses valeurs ou enfin celle qui a perdu ses illusions d'un coup peuvent-ils quantifier leur malheur ?
16/9/23
Sur les points roux de l'automne le soleil ne pose plus qu'une pâle lumière.
La nature alors fait penser à la peau d'une rousse.
18/9/23
A partir du moment où l'on s'est avisé que beaucoup de ce que l'on croyait naturel était culturel, donc construit, on a été tenté de le "déconstruire".
Comme si ce qui était depuis si longtemps construit étaint nécessairement factice, mauvais et, en tous cas, aisé à défaire. Or, quand une représentation s'use vraiment, elle finit d'elle-même par s'effondrer.
La modernité est cette période historique qui veut aller plus vite que le cours de l'histoire. La modernité croit aveuglément à l'idée d'une "plastique sociale" où l'on "déconstruit" des représentations anciennes sans pour autant fonder en droit les représentations qui doivent leur succéder.
20/9/23
Dérégulation climatique : le rythme des saisons est remplacé par celui des événements climatiques extrêmes : ouragans, canicules, inondations, tempêtes de neige... Les incendies monstres de l'été, les inondations de l'automne, etc.
21/9/23
Le sensationnel vient servir de cocaïne aux âmes blasées du nihilisme.
22/9/23
Qui en nous est bon juge de ce que nous créons ? Le critique d'art, le séducteur ou le fou ? Qui était aux commandes au moment où nous avons fini ?
23/9/23
Tout meurt, tout finit par disparaître, et il faut avancer en sifflotant comme si l'on n'avait pas vu ce désastre épouvantable derrière soi !
24/9/23
Si l'on veut bien consentir à un effort d'abstraction pour mettre de côté la dimension morale des haines collectives, et ne considérer que l'argumentation et la dimension "créative" auxquelles ces détestation donnent lieu, on est frappé par l'affligeante stupidité ou le délire monomaniaque des arguments justificateurs et par le recours aux stéréotypes grotesques qui nourrissent ces campagnes haineuses.
L'envie pressante de détruire n'offre ni le temps ni l'espace mental pour l'intelligence ou la créativité.
La haine est une muse qui a la colique.
25/9/23.
Ironie : toujours un effet de refroidissement.
On en déduit à quel moment elle est ou n'est pas la bienvenue...
26/9/23
Si les sciences peuvent répondre à la question "pourquoi l'être humain est sur terre ?" en remontant la chaîne des causes et des effets, en revanche elles ne peuvent pas répondre à la question "pour quoi l'être humain est sur terre ? "
Les mythes eschatologiques, quelques grands récits philosophiques ou simplement les idéologies viennent combler cette lacune. Mais, comme ils sont nombreux, différents et n'avancent aucune preuve, le doute les concernant est de rigueur.
En panne de réponse à cette seconde question et devant se contenter des réponses à la première, c'est finalement l'idée que la vie est absurde qui s'impose.
. Mais elle laisse dans l'insatisfaction la quête de sens global, même si le cours des jours n'en est pas affecté, tant les désirs, les habitudes et les jeux de l'ego suffisent à créer un ordre des choses là où le sens fait défaut.
27/9/23
Il me dit : "Ce qu'il nous faut affronter, bien plus que l'hostilité, c'est l'indifférence du monde. Des gens, et des choses bien sûr... Hors du petit cercle familial et amical (encore ne faudrait-il pas trop s'illusionner sur un intérêt soutenu que nos proches nous porteraient), l'indifférence - sans doute liée à notre organisation sociale et à l'egotisme qu'elle génère - reste omniprésente.
Nous sommes généralement ressentis comme insignifiants et, à notre disparition, très vite oubliés, effacés.
J'en connais beaucoup à qui cette indifférence est d'un coup révélée et qui ont du mal à s'en remettre".
En l'écoutant je me disais qu'on ne peut pas vouloir qu'on nous fiche la paix sans payer le prix de l'indifférence...
28/9/23
Un bon critique découvre les raisons de la qualité d'une œuvre, comment elle fonctionne, et pourtant il n'est pas pour autant un artiste.
C'est qu'il est dans l'après-coup, comme l'historien... Mais savoir avancer dans l'inconnu avec audace, c'est une toute autre affaire !
29/9/23
Vos humeurs sont aussi des espèces de décors qui jouent sur toutes les pensées qui vous traversent...
30/9/23.
Elle me parle de ces femmes qu'elle connaît ayant toutes l'impression pénible d'avoir raté leur vie. Elles avaient un bel amour à donner mais il n'a pas rencontré son objet... Elles s'étaient fait des plans féconds, intéressants, mais l'urgence d'un quotidien médiocre les a submergés... Et surtout un sentiment de vie exaltante s'était un jour égaré, Elles ne le retrouvaient plus...